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Perspectives sur l’actualité Santé publique - La troisième vague du Covid-19 sera-t-elle psychiatrique ? Alors que les remontées cliniques sont déjà alarmantes pour l'année 2020, les outils de la psychanalyse permettent de donner un cadre pour penser ces nouveaux échos, où peur collective et angoisse individuelle se confondent dans un temps de l'embrasement.
Le sujet handicapé mental entretient un lien de forte dépendance à son entourage qui, souvent impuissant à lui reconnaître une potentialité psychique, s’identifie à l’être corporel déficitaire. Nous explorons, à partir de séquences extraites d’entretiens cliniques avec Piotr, résidant d’un foyer d’hébergement où nous exerçons comme psychologue, la qualité du lien incestuel que l’homme entretient avec le premier objet. Nous évoquons les impasses désubjectivantes du lien mais aussi ses visées en termes de conservation du contact sensuel ainsi qu’une part du travail d’appropriation subjective mené par cet homme.
Savoir de la mort impossible, affirme Freud. « Chose » qui nous regarde, dit Lacan. La première expérience-limite (Zaltzman) est la naissance. L’emi sous coma en réactive le chaos originaire (Aulagnier), mettant l’inconscient temporairement « à ciel ouvert » (Soler). On suppose qu’il s’agit de la relance des fonctions psychiques, une fois le risque létal évité. Si la naissance s’origine dans l’arrêt de la vie fœtale, on déduira que la relance du psychisme se réinstaure à partir de cet originaire, associant le trauma pré/natal à la restauration du sujet. Cette intrication à la fois anxiogène et extatique serait projetée sur la mort dans le fantasme « emi ».
Les expériences de mort imminente désignent un vécu subjectif évoqué par certains patients dans des contextes réels ou supposés de mise en danger de leur vie, en particulier lors d’éveils de coma ou à la suite d’arrêts cardiaques. Ces expériences aux frontières de la subjectivité interrogent nos modèles théoriques et cliniques. Dans cette perspective, nous proposons dans ce travail une réflexion à partir de la rencontre de deux cliniques confrontées à ces expériences. La première concerne la pratique de psychologue clinicien en service de réanimation menant à la rencontre et au récit de patients « sur le vif » en milieu hospitalier. La seconde provient de l’expérience d’un service de consultation spécialisé dans les expériences exceptionnelles recueillant des récits d’expériences de mort imminente dans l’après-coup. Un constat émerge à la rencontre de ces deux cliniques, à savoir que ces vécus ne sont pas décrits de la même manière au sein de ces deux espaces. Les auteurs tentent de rendre intelligible cette observation dans le but de mieux comprendre la nature de ces expériences en fonction de leur contexte d’émergence. Quelques recommandations sont proposées en conclusion concernant l’accueil de ces récits et la manière de les considérer aussi bien en milieu hospitalier que dans le cadre de consultations cliniques dans d’autres cadres.
L’excitation en groupe d’enfants a souvent été considérée si excessive qu’elle ne pouvait pas permettre la symbolisation ; ce qui a poussé les psychanalystes soit à se détourner des groupes soit à en scander le temps (accueil, jeux, retour introspectif sur le jeu). Depuis plusieurs dizaines d’années, nous proposons des groupes d’enfants où l’expression (verbale, ludique, gestuelle) est laissée libre tout au long de la séance, et nous nous sommes particulièrement interrogé(e)s sur ces moments d’excitation intense et sur la « raison » de leur existence. Devons-nous les interdire, les modérer, les laisser se développer, voire les favoriser ? Jusqu’où et comment ? Que nous disent-ils du travail psychique en groupe ? Pouvons-nous leur inférer des mouvements transférentiels particuliers, leur reconnaître une place spécifique dans le développement des processus psychiques groupaux et individuels ? Ces questions sont abordées à partir de séances venant de la clinique des groupes de psychothérapie psychanalytique d’enfants lors de moments particuliers tels que ceux de la constitution de la matière psychique groupale, ceux de l’illusion groupale.
Nous oublions souvent dans quel contexte historique Freud a conceptualisé la méthode psychanalytique. Aussi donnons-nous un petit aperçu historique de cette époque autour de l’empereur Franz Joseph Ier. Par ailleurs, la langue allemande diffère de la langue française, et nous tâchons de montrer comment Freud a utilisé les ressources existantes courantes de la langue en se servant de la possibilité de fabriquer des mots composés qui unissent plusieurs termes existants mais qui forment des mots inhabituels. La vraie difficulté est de comprendre quelle relation ces mots peuvent avoir entre eux. Il s’est également appuyé sur un vocabulaire issu d’autres langues en complément du vocabulaire purement germanique pour inventer son appareil conceptuel et terminologique. Freud utilise une terminologie très rigoureuse et un vocabulaire clair et simple, ce qui ne veut pas dire que le contenu de ses textes soit facile à comprendre. Autrement dit, si on n’a pas compris la pensée freudienne, on ne peut pas vraiment comprendre ces nouveaux mots, ni les traduire correctement.
Réflexions sur la pratique de l’analyse quatrième (ou supervision ou contrôle) : que s’agit-il de décrire du travail avec le patient. Comment est-ce possible ? Quelles en sont les difficultés et paradoxes ? Illustration à travers l’œuvre de Jacques Rouxel, les Shadoks.
Si la prématuration native du petit humain nécessite la présence d’un Nebenmensch, gage de survie, le sujet déficient mental aussi réclame la présence d’un autre. Le corps de Mala porte l’empreinte du désir de mort de ses premiers objets. Sa carence mentale, ses poussées pulsionnelles confrontent les accompagnants aux effets délétères du handicap. Suite au travail groupal d’élaboration clinique, la construction d’un dispositif d’écoute a contribué à tempérer la déliaison mortifère contaminante.
Ce récit de la cure d’une enfant de 6 ans, ayant subi un traumatisme précoce, met au travail deux notions fondamentales de Ferenczi : l’introjection et la commotion psychique. Cette cure se déroule essentiellement dans des jeux pris dans la relation transférentielle. Par le jeu et le transfert, la jeune analysante pourra exprimer ses fantasmes, les transformer et dépassera la répétition du trauma dans un processus d’introjection et de symbolisation.
Des séquences cliniques où le transfert s’exprime par des manifestations corporelles (perte de la reconnaissance de son propre visage, douleur aiguë du sein, gestualité de l’enfant autiste, atteinte somatique) poussent à interroger le lien qui pourrait se tisser de « la base organique hystérique de l’analyse », selon Ferenczi, au concept de la topique originaire de P. Aulagnier et aux identifications corporelles de G. Haag. Selon l’auteure, les processus psychiques de l’autoclivage narcissique et du mirage de l’autre en soi peuvent être rattachés au fonctionnement psychique spéculaire, spécifique à la topique originaire, forgeant les identifications intracorporelles décrites par G. Haag. Ils sont alors à reconnaître au fonctionnement du fondement de tout psyché avec les modalités de transformation propres aux processus primaires et secondaires.
Le journal reconstitué de Ferenczi (d’août 1930 à fin décembre 1932) révèle un dispositif pour questionner, à partir des critiques de ses patients, sa conduite des cures et ses contre-résistances, une fois suspendu le dialogue avec son ex-analyste mais toujours « contrôleur », Freud. Son écriture polyglotte déjà symbolise ce qui deviendra concept : la langue des adultes et celle de l’enfant.
La situation psychanalytique et son procès ne peuvent donner lieu à ce que l’on appelle stricto sensu une description, mais seulement à une écriture. J’entendrai cette écriture comme la conjugaison d’une écriture créative de l’analysant qui n’est pas le plus souvent transcrite et de l’écriture de l’analyste qui tente de théoriser l’interprétation des obstacles s’opposant à la créativité de l’analysant. Cet article étudie cette dialogique dans son rapport avec l’écriture dite « poétique ». La sublimation en est le maître mot.
Friedrich Nietzsche, né en 1844, meurt en 1900, année de parution de L’interprétation des rêves, ce livre où, comme le dit O. Mannoni, « s’est ouvert l’inconscient ». Dix années de silence consécutives à l’effondrement vécu, en 1889 à Turin, lorsqu’il est témoin de la maltraitance d’un cheval par son charretier, ont précédé sa mort ; il ne pouvait connaître l’œuvre de Freud. Et Freud qui, lui, connaissait l’œuvre de Nietzsche n’aura cessé de s’en défendre. Il s’en expliquera dans Sigmund Freud présenté par lui-même, son autobiographie écrite en 1925-1926 : « J’ai soigneusement évité de m’approcher de la philosophie proprement dite… Les larges concordances de la psychanalyse avec Schopenhauer… ne peuvent se déduire de ma familiarité avec Schopenhauer. J’ai lu Schopenhauer très tard dans ma vie. Quant à Nietzsche, l’autre philosophe dont les pressentiments et les aperçus coïncident souvent de la manière la plus étonnante avec les résultats laborieux de la psychanalyse, je l’ai longtemps évité précisément pour cette raison : la priorité de la découverte m’importait moins que de rester sans prévention ». Si Freud peut reconnaître en Nietzsche une égale passion pour déchiffrer, éclairer toutes les dimensions de la vie psychique et, dès 1908, rendre hommage à son « degré d’introspection qui n’a jamais été atteint par personne avant lui et ne le sera sans doute jamais », il ne saurait, pour autant, céder sur le privilège qu’il accorde pour assurer la légitimité des connaissances sur la psyché aux « résultats laborieux » acquis par l’observation scientifique sur la pensée spéculative…
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