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Si l’animal traverse l’œuvre entière du savant, ce n’est qu’à l’automne de sa vie que l’homme Freud s’intéressera concrètement à l’un de ses spécimens — le chien —, se prenant d’affection pour ce dernier jusqu’à le faire « participer » aux séances analytiques. Comment comprendre cette mise en acte inattendue ? L’approche de cette pratique singulière montre à l’évidence que, loin de constituer la transgression d’un cadre encore à construire, il s’agit bien d’un « inanalysé » du spécialiste de la psyché dont les effets persistent encore aujourd’hui.
L’homme et savant Freud fut inévitablement confronté à l’hostilité générée par l’identité juive, et son appartenance au peuple maudit le prédisposa à l’élaboration de ces mouvements ambigus, voire ambivalents, si ce n’est hostiles ou haineux, notamment ceux traversant et ciblant les Juifs. Ce faisant, en s’interrogeant sur les fondements d’une telle hostilité millénaire, c’est à la nature de son identité et à ses origines qu’il est conduit, sans cependant être en mesure d’en fournir une interprétation autre que mythique.
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La lecture de l'œuvre de Piera Aulagnier a conduit au constat que ses foisonnantes constructions théoriques obéissent, dans leur nomination, à une exigence de figurabilité. Dans cette lignée j'émet l'hypothèse de l'intérêt de compléter par le concept de désir de non besoin celui de désir de non désir. Un bref questionnement du concept de violence de l'interprétation permet de rappeler l'importance que Piera Aulagnier accorde à la notion d'anticipation ainsi qu'au désir.
La topique de l'originaire de Piera Aulagnier, avec sa dynamique et son économie permet à l'analyste de penser en images de choses corporelles et résonne fortement avec la genèse du moi-corporel que G. Hagg a longuement développée au cours de ses travaux théorico-cliniques. La première rencontre de la psyché serait celle qu'elle fait avec son corps, un corps chimérique, fait d'objet-zones complémentaires, tout mêlé à l'espace corporo-psychique du premier autre. Ces approches théorico-cliniques ouvrent une voie possible à l'abord des figurations gestuelles, corporelles et comportementales des enfants autistes et, à leur interprétation dans le transfert, qui, en nommant leur vécu intime, les attire dans le monde du fantasme et du langage. Quelques séquences cliniques viendront rendre compte des perspectives ouvertes par ces concepts et de l'indissociabilité de la pratique analytique avec sa théorie.
Dans cet article, l'auteur propose de repenser la dimension de l'originaire dans la métapsychologie de Piera Aulagnier à partir de sa pratique clinique avec des enfants autistes en hôpital de jour. Il propose de penser que l'originaire est caractérisé par un non-transfert à la base de toutes les logiques identitaires. Ancrées dans des logiques de corps en présence plutôt que de représentation de l'absence, elles n'entrent pas dans une histoire au contraire du processus identificatoire dont il postule le commencement avec le primaire. Enfin, en s'appuyant sur la pensée d'Adolf Portmann, il propose de différencier les bio-logiques fonctionnelles, les morpho-logiques d'apparition/disparition des corps en présence et enfin les psycho-logiques ancrées dans la représentation de l'absence.
Parmi les différents destins psychopathologiques possibles, on a coutume, avec Freud, d'opposer la névrose, la psychose et la perversion. En proposant la notion d'aliénation, ou du moins en la reprenant dans un sens nouveau, Piera Aulagnier se situe au-delà des catégories psychiatriques rigides, dans une différenciation proprement psychanalytique entre deux types fondamentaux de conflits, soit le fait que dans la névrose le conflit porte entre le Je et ses idéaux, tandis que dans la psychose il se situe au sein même du Je lui-même, entre sa part identifiante et sa part identifiée, ce qui est vrai dans une certaine mesure aussi pour les perversions. C'est donc une troisième voie qui s'ouvre avec l'aliénation et que l'on peut résumer dans la tentative pour abolir le conflit lui-même.
En élargissant la scène psychique freudienne, la métapsychologie de P. Aulagnier permet l'accès à un espace somato-psychique originaire d'activité représentative pictographique. À partir donc de l'action du pictogramme cet article pose la question de l'existence d'une force présentante et imageante interne, envisagée au regard de l'émergence de la représentation et de l'auto-constitution de la psyché, à savoir dans son rapport au corps sensoriel, à la figurabilité, à la réflexivité et à l'indétermination créatrice.
Le passage du pictogramme, comme image de la chose corporelle, aux processus de primaire et secondaire est abordé à travers certaines situations cliniques qui nécessitent l'apport figuratif de l'analyste. Ce qui permet l'hypothèse d'une circularité possible de l'in-formation sensorielle-érogène-affective entre des espaces psychiques hétérogènes et une appropriation potentielle du message, selon les postulats qui régissent le fonctionnement de chaque espace. Les constructions figuratives et interprétantes de l'analyste s'intègrent à ce travail auto-créateur du sujet, qui signe la poïesis de soi-même et du monde.
Sortir de la répétition qu'imposent les passions et les peines infantiles ainsi que la jouissance attachée au fantasme qu'a organisée la sexualité infantile, suppose une relance chez l'analysant de "sa capacité d'historien". La mise en regard de deux récits cliniques tente d'illustrer deux modalités de travail analytique pour atténuer l'emprise de la répétition d'un fantasme de fusion soutenu par un voeu de mort maternel.
Ce texte propose une discussion à propos de la façon dont le pictogramme peut être utilisé dans des cliniques dites de l'extrême. L'auteur propose de penser la clinique de l'éveil de coma comme un éveil à la sensorialité convoquant l'écoutant dans un espace de rêverie partagée mettant et ou remettant en jeu la notion de pictogramme au travers de télescopages de vécus perceptifs actuels est de fueros. Ces télescopages convoquent alors ce qu'il nomme "pictogramme de secours".
La "quête de sens" est ce mouvement indispensable à la construction psychique qui, comme l'huître perlière secrète sa nébuleuse de représentations autour des grains de sable émanant du trauma infantile. Elle est soutenue par le travail de l'interprète, concernant l'analyste comme l'analysant, qui flirtent avec le "discours intérieur" (J-C. Rolland) et "le langage pictural" (P. Aulagnier)
Sous ce titre, il va être question de revisiter les incidences des transformations induites par l’hypermodernité sur la vie des institutions de la mésinscription (soin, travail social, carcéral, etc.), ceci à partir de ce que nous repérons des mouvements de découragement et de désespoir, dans leurs corrélations avec l’effacement, voire avec l’effondrement des systèmes de croyance inhérents à tout projet institutionnel et à toute groupalité. Il s’agira, dans le travail groupal, d’accepter de co-éprouver la désespérance, et de la penser comme point de bascule qui permet de passer d’une « fixation » mélancolique à une « position mélancolique » par le biais d’une élaboration de ce qui se présentifie des mouvements mortifères. Dans un deuxième temps, nous aborderons une situation de clinique groupale institutionnelle qui nous permettra de nous rendre attentifs à la nécessité dans laquelle se retrouvent les professionnels : celle de réinstaurer des espaces d’humanisation, qui sont autant d’agirs de subversion ayant valeur transitionnelle. Ces aménagements conduisent en effet à transgresser les normes et les procédures, et à recréer des espaces de jeu, face à la menace de stérilisation, qui pèse sur le vivant, au quotidien de la vie des institutions.
De son expérience singulière d'enfants pris dans l'horreur de la Shoah, Aharon Appelfeld, écrivain israélien, a tissé une œuvre dont l'obsession est de relier par la mémoire sensorielle fichée dans son corps les fils qui le relient à l'Europe de son enfance, à ses parents, à la parole sacrée oubliée par les générations qui l'ont précédé. Inventeur d'une langue de l'intime créée par le silence et la méditation, il développe aussi un imaginaire d'artiste sous l'ombre familière et tutélaire de Kafka, par un jeu de miroirs où le réel se joue à la fois du document comme trace et du fantastique comme genre. Aharon Appelfeld a été lauréat du prix Médicis en 2004.
Il ne s'agit ici non pas tant de discuter le dernier livre de Ghyslain Lévy, Le don de l'ombre, que de venir témoigner des résonances éprouvées à la lecture. Résonances d'autant plus précieuses qu'elles viennent me parler de ce que nous partageons depuis plus de vingt ans, au sein du groupe de recherches "Littérature personnelle et psychanalyse", dont ....
Les textes réunis dans le dossier de ce numéro sont issus des communications prononcées lors des deux dernières journées d'étude d'Annecy. Nous avons voulu faire de ces journées un lieu propice à l'échange, à la réflexion et à la rêverie, autour de la rencontre du psychanalyste et de l'écrivain – son écrivain. Ainsi souhaitions-nous faire entendre quelque chose du lieu où s'engage la subjectivité de chacun pour écouter, pour écrire, pour lire et pour penser l'autre ...
A partir du roman fantastique de Jacques Spitz, paru en 1945, "L'oeil du purgatoire", l'auteur interroge la notion de temporalité analytique et ouvre sur des questions liées à la singularité du fonctionnement de la vie psychique, mais aussi à l'actuel des algorithmes prédictifs et à l'intérêt de la science-fiction dans le devenir du futur de l'humain.
Entre mélancolie et paranoïa, le texte de Philip K. Dick donne à voir les traces sensibles de l'originaire, qui sont à la base de ces deux façons d'être au monde et à soi-même. L'urgence d'écrire répond pour lui à une nécessité d'inscrire dans les mots cet affolement des images et des temporalités, marquant le désarroi du narcissisme primaire et la nécessité d'inventer le symptôme. Le futur ne serait-il que la confiance dans une mémoire espérante ? Au risque d'une désintrication des pulsions de vie et de mort.